En avril 2017, un projet de loi C-45 a été déposé à la Chambre des communes, lequel vise l’accès légal au cannabis et le contrôle de sa production, distribution et vente au Canada et ce, à compter du 1er juillet 2018. Ce projet de loi accueille bien des critiques qu’elles soient pour ou contre et fait couler beaucoup d’encre en ce qui a trait à son contrôle en contexte de travail. Dans le cas où le tout se concrétise, serez-vous prêt à le gérer?
JURISPRUDENCE LIMITÉE
Les études actuelles démontrent qu’il est difficile de détecter la consommation récente de THC dans le sang et, donc, de contrôler les aptitudes d’un travailleur à exercer ses fonctions pleinement, voire même à déterminer le moment de la consommation. En l’occurrence, un employé pourrait avoir consommé le samedi alors qu’il était en congé et garder des traces de THC dans son sang pendant plusieurs jours. C’est ce qui inquiète notamment les employeurs… le contrôle!
De plus, s’il survient un accident et qu’il est démontré que l’employé avait consommé, y aura-t-il indemnisation par la CNESST? L’employeur sera-t-il tenu responsable?
Pour l’instant, notre meilleure recommandation consiste évidemment à demeurer à l’affût du débat et des décisions gouvernementales pour déterminer la suite des choses. Comme cette situation est nouvelle, la jurisprudence devra se dessiner sur quelques années encore. Or, nous sommes d’avis à l’instant qu’il serait prudent de gérer les situations tel que vous le feriez avec l’alcool et les médicaments.
L’ALCOOL AUSSI EST LÉGAL!
En effet, ce n’est pas parce que l’alcool est légalement vendu aux personnes de 18 ans et plus qu’il est permis d’en consommer au travail, ni de se présenter au travail sous l’effet de l’alcool, ni d’apporter une bouteille de bière dans son casier, ni d’en vendre à des pairs! Tout comme pour l’alcool, ce n’est pas parce qu’une consommation à l’intérieur des limites permises est acceptable en conduite automobile qu’elle est nécessairement acceptable sur les lieux du travail. Effectivement, il y a plusieurs postes pour lesquels le fait de travailler avec les facultés minimalement altérées peut mettre en danger non seulement la productivité, mais aussi, la sécurité de l’individu et de ses collègues. Or, vous doutez qu’un employé a consommé et que ses facultés sont altérées? Il sera peut-être plus prudent de le retourner chez lui ou de l’envoyer en expertise médicale d’urgence (en taxi et avec salaire svp!), afin de bien se positionner sur la situation. Vous appliquez une tolérance zéro en ce qui a trait à la consommation de drogues et alcool en raison du contexte de votre entreprise? Ceci ne devrait pas changer en raison de la légalisation de la marijuana!
OBLIGATION D’ACCOMMODEMENT
Nous tenons également à rappeler le cadre de l’obligation d’accommodement qui demeure toujours effectif en ce qui a trait à la dépendance aux drogues (légales ou non). La dépendance aux drogues et/ou à l’alcool est considérée comme un handicap en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne. En tant qu’employeur, vous êtes déjà dans l’obligation d’appliquer les procédures d’accommodement et ceci ne changera pas.
CONSOMMATION POUR FINS MÉDICALES
Saviez-vous que depuis août 2016, il est permis de consommer du cannabis pour des fins médicales? Le Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales définit les règles concernant cet usage, mais ne détermine pas le cadre de consommation, notamment au travail. Présentement, les tribunaux aborderaient ces situations en termes de discrimination fondée sur le handicap, ce qui signifie qu’il pourrait vous être reproché de discriminer un employé qui se doit de consommer sur prescription médicale. TOUTEFOIS, notre recommandation dans un tel contexte irait dans le même sens que tout autre médicament pour lequel il peut ou pourrait y avoir des effets secondaires. Il s’agirait donc de traiter la situation en vous assurant que le médecin traitant (ou votre expert désigné) puisse se positionner sur les aptitudes du travailleur à effectuer ses tâches sans limitation et de façon sécuritaire (pour lui et pour les autres). Dans le cas où des limites seraient établies, vous devrez vous positionner sur la possibilité d’accommoder le travailleur pour la durée des limitations. Sinon, et que vous êtes en mesure de le démontrer, vous pourrez prendre les décisions (temporaires ou définitives) qui s’imposent.
À savoir :
- l’avis du médecin doit inclure, entre autres, la quantité quotidienne prescrite et la période d’usage
- l’endroit où l’employé se procure le cannabis doit être identifié comme un distributeur autorisé par le gouvernement (vous pourriez être justifié de demander à consulter la facture s’il doit consommer au travail)
En conclusion, ce qu’il faut se rappeler est qu’il n’y a pas lieu de paniquer! Vous gérez déjà l’alcool et la prise de médicaments? Vous avez déjà un bon bout de chemin de fait!
Lectures suggérées
- Comment s’adapter à la légalisation du cannabis en milieu de travail : modèle de politique (Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, novembre 2017)
- Légalisation du cannabis : la FCEI demande au gouvernement d’outiller les employeurs (Fédération canadienne de l’entreprise indépendante, citée par Cision)
Ce texte ne constitue pas un avis professionnel. Les lecteurs ne devraient pas agir sur la seule foi des informations qui y sont contenues.
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